Je suis queer…
Article original par Moira Armstrong ; traduit par LAbare / Florïan Lorenzetta
Thèmes : asexualité, questionnement.
Et je ne dis pas queer juste pour signifier une orientation sexuelle ou une identité de genre en-dehors du cadre hétérosexuel ou de la binarité de genre,
Ni même pour signifier étrange ou curieux d’un point de vue conventionnel ;
Je dis queer pour signifier d’un caractère ou d’une nature douteuse.
Queer, c’est-à-dire
Aucune des trois Grandes Lettres Bénites de la sexualité
ne m’a jamais semblé me convenir, c’était plutôt
comme une étiquette qui gratte, ce sentiment
qui me triturait l’esprit : je n’avais pas d’étiquette.
Je n’arrivais pas à comprendre
qui m’attirait (ou s’il y avait même un
« qui » à inclure dans la question), et alors que
tout le monde avait trouvé sa propre réponse,
personne ne pouvait m’aider.
De savoir que tout le monde avait trouvé, compris, et
fièrement affiché cette part d’elleux-mêmes qui reflétait
parfaitement l’image de leur vie, et de tous les mots que j’ai
testés comme les échantillons d’un nuancier, il planait
toujours l’ombre d’un doute qui empêchait toute couleur de me correspondre
parfaitement.
Je dis queer pour signifier mauvaise’, sans valeur, ou trompeur.
Queer, c’est-à-dire
Je me suis retrouvée dans un murmure,
un terme obscur en harmonie
avec mes ressources et avec ma vie, mais ni
avec la société gavée de sexe ni avec la communauté gavée de sexe.
Je me suis retrouvée à espérer plus que tout
rencontrer non seulement une femme, mais
une femme qui ne voudrait pas qu’un coup d’un soir,
à ne trouver que déception dans ce petit monde
que j’avais si longtemps espéré rejoindre, jusqu’-
à inventer des excuses pour manquer les marches des fiertés.
Je me suis retrouvée à me mêler tant bien que mal à la foule
pour qu’on m’accepte, à me sentir un peu à l’étroit
mais à m’adapter petit à petit à la pression.
Mais peu importe qu’on en ait l’habitude,
on est toujours mal à l’aise d’être sous pression.
Je dis queer pour signifier qui se sent physiquement mal ou perturbée’.
Queer, c’est-à-dire
Vous avez vu toutes ces pubs avec des femmes dénudées
Et des hommes torse nu pour ornementer leurs produits parce que tout le monde
Va se ruer pour les acheter dès que leurs hormones montent en flèche ?
Ou encore celles où un type tripote sa salade comme s’il allait coucher avec ?
Vous avez vu tous ces groupes d’ados
qui se racontent leurs histoires d’amour et leurs exploits sexuels
(que ce soit avec leur grand amour ou pas) et qui en rigolent
comme si ça n’avait aucune importance ?
Vous avez déjà vu quelqu’une’ détourner le regard
Pendant que ces pubs passent ? Quelqu’un rougir
Pendant que les autres papotent ? C’est moi.
Je ne comprendrai jamais vraiment en quoi ces blagues sont drôles,
En quoi la chose est séduisante, et j’ai entendu des gens
Parler dans mon dos, dire que je suis bizarre et anormale.
Non, je veux leur dire
Asexuelle.